Vis ma vie de biographe

Emma, jeune élève de Seconde qui m’a suivie dans mon travail pendant deux semaines, raconte son expérience. Ou comment se voir de l’autre côté du miroir et apprécier l’image que l’on transmet de son métier.

“ Au cours de mes deux semaines de stage, j’ai découvert, observé, écouté et participé aux différents projets de l’auto-entrepreneure Anne-Claire Parola.

Entretiens : L’impression d’avoir fait un bond dans le temps

Le premier entretien auquel j’ai assisté était chez un vieil homme. Son récit sert pour la mémoire des habitants d’une commune. Je devais prendre des notes pour retranscrire son histoire. Il a suffi de lui poser une question et il a commencé à raconter son époque. En transcrivant, je n’avais pas le temps de me concentrer sur chacune de ses paroles. Je me visualisais ce qu’il disait. J’avais l’impression d’avoir fait un bond dans le temps. Je me sentais comme dans un cours d’Histoire ou plongée dans un film. Parfois, il se dispersait en parlant de moments qu’il avait vécus hors de la commune concernée. Mme Parola ne le coupait pas, parce que cela reste intéressant. Il semblait heureux de pouvoir transmettre. Il a raconté l’apparition de l’électricité ou encore l’hiver 1956 à Bordeaux, où il a vu des personnes descendre une rue en ski. C’était compliqué de communiquer avec lui car à cause de son âge, il n’entendait plus très bien. Cependant, il possède une mémoire hallucinante, il a été capable de donner les noms de chacun de ses camarades de classe de primaire, il a retenu des dates précises avec les heures.

J’ai pu participer à un autre entretien. C’était aussi une personne âgée. Je n’ai pas pris de notes cette fois-ci. J’ai donc pu mieux saisir ce qu’elle racontait. C’était souvent dur de suivre. Mais je me suis rendu compte que j’avais appris et réappris plein d’événements de l’Histoire. Ces personnes les ont vécus, personne ne peut les raconter mieux qu’eux. J’ai mieux retenu certaines dates. Comme l’Occupation allemande, l’hiver 1956 ou encore Mai 1968. J’ai vraiment adoré participer aux entretiens. J’avais l’impression que c’était ma grand-mère qui me parlait du vieux temps. J’ai trouvé chacun des entretiens intéressant. Ce n’était pas la même personne, ni la même histoire, pourtant ce qu’ils racontaient était lié.

Retranscriptions : Je n’avais plus envie de m’arrêter

Avec mes notes et mes souvenirs, j’ai écrit, comme si c’était le monsieur qui parlait, en reprenant ses expressions, telle celle qu’il a répété lors du second entretien : « Je faisais souvent des bêtises, si je n’en faisais pas j’étais malade ! ». Il disait aussi « mémé » pour évoquer les mères. Retranscrire était difficile, au début. Puis, quand j’ai commencé à vraiment être dans l’histoire, je n’avais plus envie de m’arrêter, même si je n’avais pas réussi à tout prendre en notes.

J’ai écrit sur l’entretien avec la dame âgée, malgré le fait que je n’avais pas pu prendre de notes, la biographe m’a lu les siennes. C’était un peu plus compliqué, alors j’ai rédigé seulement ce que j’avais retenu et trouvé intéressant et amusant. Je n’ai pas le droit d’en parler, je dirais juste que cela parlait d’un cinéma, d’un accouchement et de la princesse de Monaco…

L’outil principal de la biographe est l’ordinateur. Autour d’elle, il y a beaucoup de dossiers pour chaque projet avec une couleur attitrée, idem pour ses carnets.

Les ateliers sont remplis d’émotions et de souvenirs

Les ateliers étaient complètement différents. Les participants à ces séances mensuelles se connaissent bien à force de se voir. Ils se livrent, à l’aide de jeux d’écriture, créés pour certains par Anne-Claire Parola. Les ateliers sont remplis d’émotions et de souvenirs et surtout d’écriture et d’imagination. Exactement ce que j’adore ! Un des groupes devait organiser ses écrits pour en faire un livre. Chacun proposait ses idées.

Le second atelier était en visioconférence, il reste pourtant encore plus chargé d’émotions. Ce sont des femmes qui ont le cancer du sein, à des stades différents. La veille, nous avons lu les écrits qu’elles avaient envoyés. Quand elles lisaient à haute voix leurs poèmes, récits, cela rendait leurs mots encore plus forts. Certains m’ont presque fait pleurer. J’ai pu apprendre de leur vision du monde, ainsi que du vocabulaire médical.

La réalisation d’un livre : Il faut tout vérifier, même si on manque de temps !

J’ai effectué des relectures pour deux projets distincts. J’ai constaté que cela prenait énormément de temps. Il faut tout vérifier, même si on manque de temps. La relecture d’un recueil de mémoire des habitants était ma première mission. Mon travail consistait à vérifier qu’il n’y avait pas de fautes de frappe ou d’orthographe. J’y ai lu la vie d’avant. Cela m’a tout de suite plongée dans le monde de biographe. Cela m’a aussi aidée pour les entretiens. J’ai découvert qu’après avoir fait la mise en page et avoir envoyé le texte, l’imprimerie adresse le BAT (bon à tirer).

J’ai découvert le monde d’une auto-entreprise. J’ai appris énormément pendant mes deux semaines de stage. Il faut s’organiser, surtout quand il y a des jours remplis. Le métier de biographe est social et permet d’apprendre tellement des autres. ”

Merci Emma !

Ses mots à jamais gravés